Samedi 29 juin, l’UDC a tenu son Assemblée des délégués à Orbe. Dans ce cadre, ses responsables ont tenu des propos inacceptables sur nos voisins européens. Son président, Albert Rösti, a appelé les Suisses rejeter l’accord-cadre conclu avec l’UE en faisant preuve du même esprit de résistance que le Général Guisan durant la Seconde guerre mondiale. Plus explicite, le conseiller national Adrian Amstutz n’a pas hésité à dire que le pouvoir bruxellois lui faisait penser à l’Allemagne nazie.
Cette falsification de l’Histoire est choquante. Effectuer des parallélismes entre le régime nazi et l’UE à des fins de propagande constitue une stratégie ignoble. D’abord, parce que la Communauté a été construite sur les ruines et les cadavres de la Seconde guerre mondiale, précisément pour qu’une telle tragédie ne se reproduise pas. Ensuite, parce que la Suisse profite largement de la paix et de la prospérité que la construction européenne a permis d’établir et de pérenniser sur notre continent. Enfin, parce que ces comparaisons insultent non seulement l’Union, son Parlement, ses membres et ses peuples, mais aussi les millions de soldats qui ont donné leur vie pour sauver les libertés dont la Suisse jouit, sans avoir dû se battre contre les nazis.
Malheureusement, cette réécriture scandaleuse de l’Histoire est également emblématique de l’europhobie dans laquelle la Suisse est en train de sombrer. Les actuelles discussions sur l’accord-cadre ne sont pas le problème. Les questions sont légitimes. Les critiques peuvent s’avérer fécondes. Les éclaircissements sont nécessaires et au demeurant possibles.
Le danger est que les oppositions d’où qu’elles viennent diffusent les mêmes contre-vérités. L’Union est arrogante. Elle ne respecte pas la Suisse. Elle veut imposer sa loi. La Confédération ne doit pas s’agenouiller, mais se battre contre ce monstre bureaucratique qui la menace. Une fois de plus, il convient de rappeler tant aux nationalistes qu’aux syndicats que la Suisse peut parfaitement déchirer l’accord-cadre s’il ne lui plaît pas. De même, elle peut renoncer à la libre circulation des personnes et aux accords bilatéraux si elle le désire. Par contre, il apparaît douteux qu’elle puisse continuer de profiter du Grand marché européen en n’acceptant que les règles qui lui conviennent.
Depuis des années, face à des clichés europhobes qui se sont installés et ont pris valeur d’évidences, les rappels des faits et de leurs conséquences se font rares. C’est là que réside le vrai défi de la Suisse : peut-elle encore sortir de discours nationalistes fiévreux qui faussent son jugement ? Qui tient les mots fait l’Histoire. Aujourd’hui, celle de la Suisse ressemble chaque jour davantage à une longue marche vers l’isolement.